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SALIM BRAHIMI

Salim Brahimi, commissaire du FIBDA

«L’intelligence artificielle inquiète beaucoup les artistes»

Cette 17ᵉ édition du Festival international de la bande dessinée d’Alger s’achève sur une bonne note. Quel bilan en tirez-vous ?

Effectivement, c’est une édition exceptionnelle, sans exagération. Vous l’avez sans doute remarqué si vous avez visité le Festival, nous avons battu un record en matière de participation. Le public a afflué massivement, surtout durant le week-end. Les premiers jours étaient un peu timides, car coïncidant avec la reprise des cours, c’est un rythme auquel nous sommes habitués, mais dès vendredi, c’était un véritable rush ! À un certain moment, nous avons même dû fermer temporairement les portes du festival pour réguler l’accès, le temps que l’espace se libère un peu.

Cette clôture est magnifique, une ambiance de fête et de joie autour du neuvième art. Nous célébrons la bande dessinée dans toute sa diversité, tout en gardant une pensée émue pour nos frères en Palestine, à qui nous avons rendu hommage à travers des planches réalisées par des artistes palestiniens. Certains vivent à Ghaza, d’autres à l’étranger, mais beaucoup ne peuvent pas se déplacer en raison des restrictions imposées par certains pays occidentaux. Leurs œuvres ont été exposées ici, à Alger, et nous tenions à leur rendre hommage pour leur courage et leur talent.


Quelles ont été les grandes nouveautés de cette édition ?

Cette année, nous avons voulu enrichir encore davantage le contenu du Festival. Plusieurs thèmes ont été abordés, dont celui de l’intelligence artificielle, un sujet qui suscite beaucoup de débats dans le monde artistique. Nous avons multiplié les échanges internationaux, élargi l’espace dédié aux enfants et densifié les ateliers pour offrir plus d’activités participatives.

Nous sommes très heureux de constater que le FIBDA est devenu un espace de dialogue et de créativité, où les jeunes talents côtoient des artistes confirmés. Notre ambition est de continuer à honorer cet art majeur qui nous fait rêver, cet art qui nous passionne tous : la bande dessinée.


Justement, vous évoquez l’intelligence artificielle. Quels défis pose-t-elle aujourd’hui au neuvième art ?

L’intelligence artificielle inquiète beaucoup les artistes, pas seulement dans la bande dessinée. Certains craignent de perdre leur travail et c’est déjà le cas dans des pays où l’industrie du story-board, de l’ancrage ou du doublage est très développée. Les grèves se multiplient dans ces secteurs.

Nous avons organisé une rencontre à ce sujet, car il devient de plus en plus difficile de distinguer une œuvre réalisée par un artiste humain de celle produite ou modifiée par une IA. Même dans nos concours, la question se pose : comment identifier ce qui a été fait par une machine ? Le festival doit désormais adapter sa législation pour mieux encadrer ces nouvelles pratiques.

Honnêtement, nous nous interrogeons encore. L’IA progresse vite, et parfois, le résultat est si réaliste qu’il devient presque impossible de faire la différence. C’est un défi éthique et artistique majeur que nous devrons affronter collectivement.